Deux explorations différentes du comte
Le film est une adaptation littéraire inspiré du conte La
Belle et la Bête du recueil le magasin des enfants de Madame Leprince de
Beaumont datant de 1757. Le conte de Madame Leprince de Beaumont est un conte
ayant pour but de distinguer laideur et beauté sur le plan physique et moral.
Le conte oppose des personnages doubles dans lesquels identité physique et
morale ne s’articulent pas. D’un côté, les deux sœurs de Belle ont le physique
et le comportement de deux princesses mais sont profondément égoïstes,
paresseuses et jalouses. De l’autre côté, la Bête se trouve pourvue d’un
physique monstrueux mais au fond est pleine de tendresse et de générosité.
« L’enfance croit ce qu’on lui raconte et
ne le met pas en doute. Elle croit qu’une rose qu’on cueille peut attirer des
drames dans une famille. Elle croit que les mains humaines d’une bête qui tue
se mettent à fumer et que cette bête en a honte lorsqu’une jeune fille habite
sa maison. Elle croit mille autres choses bien naïves. C’est un peu de cette
naïveté que je vous demande et, pour nous porter chance à tous, laissez-moi
vous dire quatre mots magiques, véritable « Sésame ouvre-toi de l’enfance »
Jean Cocteau
Dans ce film, le but de Jean Cocteau est
que l’on ouvre son esprit pour se mettre à la place d’un enfant, c’est-à-dire
voir les choses tout simplement, se laisser submerger par l’esprit magique d’un
comte et ainsi poser un regard un peu naïf sur un film moralement intéressant :
peut-on et doit-on aimer quelqu’un en dépit de sa laideur physique ?
L'intention de Cocteau était donc plutôt de montrer le merveilleux. De plus
selon Christian Gans « La force de
Cocteau, c'est d'avoir inscrit son œuvre d'une manière oblique, il n'essaye pas
de fermer complètement ses créations, il a ce souci de les laisser un peu
ouvertes, comme s'il voulait inviter des perceptions différentes. Peut-être
percevait-il aussi au fil du temps que la façon de recevoir ce qu'il avait
fait, en tant que poète ou en tant que cinéaste, allait changer […] ». Comme
tout comte / fable, le film de Cocteau est intemporel : Il ne se situe vraiment
dans aucune époque, et la temporalité au sein même du film est contrariée ; les
espaces-temps sont multiples. Le jour et la nuit ne sont pas synchrones. La
Bête déclare : « Ma nuit n’est pas la vôtre. Il fait nuit chez moi. C’est le
matin chez vous. » Ces paroles mettent en avant le fait qu’outre plusieurs
temps, il est aussi plusieurs mondes, que les personnages peuvent traverser.
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